Au Bar Défi Lancé

if you gotta ask, you'll never know!

Thursday, March 31, 2005

A jouer chez vous : l'asile ami

Là! L'Asie. Sol miré, phare d'haut, phalle ami docile à la femme, il l'adore, et dos ci dos là mille a mis! Phare effaré la femme y résolut d'odorer la cire et la fade eau. L'art est facile à dorer : fard raide aux mimis, domicile à lazzi. Dodo l'amie outrée!

-Robert Desnos-

Nuit de Sabbat


Méphistophélès
Tout le tourbillon s'élance là-haut. Tu crois pousser, et tu es poussé
Faust
Qui est celle-là?
Méphistophélès
Considère-la bien, c'est Lilith
Faust
Qui?
Méphistophélès
La première femme d'Adam. Tiens-toi en garde contre ses beaux cheveux, parure dont seule elle brille : quand elle peut atteindre un jeune homme, elle ne le laisse pas échapper de si tôt.

Raffiné

"Pour moi mon bras vaut mieux que ma langue. Il suffit que le combat me donne la victoire, tu peux garder la supériorité de la parole"

-Hercule-

Désinvolte

Parole

J'ai la beauté facile et c'est heureux
Je glisse sur le toit des vents
Je glisse sur le toit des mers
Je suis devenue sentimentale
Je ne connais plus le conducteur
Je ne bouge plus soie sur les glaces
Je suis malade fleurs et cailloux
J'aime le plus chinois aux nues
J'aime la plus nue aux écarts d'oiseau
Je suis vieille mais ici je suis belle
Et l'ombre qui descend des fenêtres profondes
Epargne chaque soir le coeur noir de mes yeux

-Paul Eluard-

Dialogue

"_ Que suis-je supposer jouer? Y-a-t-il des lignes mélodiques, des accords dans cette musique?
_ Bien sûr, nous avons nos mélodies à nous et nos accords."

-Eric Dolphy répond à Herbie Hancock-

Scientifique

"Le poète est un transformateur de puissances. La poésie, c'est du réel humanisé, transformé, comme la lumière électrique est la transformation d'une énergie redoutable et meurtrière à trop haute tension. Au réel vrai le poète substitue le réel imaginaire. Et c'est le pouvoir, ce sont les moyens d'élever ce réel imaginaire à la puissance de la réalité matérielle et de la dépasser en la transformant en valeur émotive qui constitue proprement la poésie."

-Pierre Reverdy-

Wednesday, March 30, 2005

Malte Laurids Brigge

"Hélas! les vers signifient si peu de chose quand on les écrit trop tôt. Il faudrait attendre, accumuler toute une vie le sens et le nectar - une longue vie, si possible - et seulement alors, tout à la fin, pourrait-on écrire dix lignes qui soit bonnes. Car les vers ne sont pas faits, comme les gens le croient, avec des sentiments (ceux-là, on ne les a que trop tôt) - ils sont faits d'expériences vécues. Pour écrire un seul vers, il faut avoir vu beaucoup de villes, beaucoup d'hommes et de choses, il faut connaître les bêtes, il faut sentir comment volent les oiseaux et savoir le mouvement qui fait s'ouvrir les petites fleurs au matin. Il faut pouvoir se remémorer des routes dans des contrées inconnues, des rencontres inattendues et des adieux de longtemps prévus -, des journées d'enfance restées inexpliquées, des parents qu'il a fallu blesser, un jour qu'ils vous ménagaient un plaisir qu'on n'avait pas compris (c'était un plaisir destiné à un autre...), des maladies d'enfance, qui commencaient étrangement par de profondes et graves métamorphoses, des journées passées dans des chambres paisibles et silencieuses, des matinées au bord de la mer ; il faut avoir en mémoire la mer en général et chaque mer en particulier, des nuits de voyage qui vous emportaient dans les cieux et se dissipaient parmi les étoiles - et ce n'est pas encore assez que de pouvoir penser à tout cela. Il faut avoir le souvenir de nombreuses nuits d'amour, dont aucune ne ressemble à une autre, il faut se rappeler les cris des femmes en gésine et l'image des blanches et légères accouchées endormies, qui se referment. Il faut avoir été aussi au côté des mourants, il faut être resté au chevet d'un mort, dans une chambre à la fenêtre ouverte, aux rares bruits saccadés. Et il n'est pas encore suffisant d'avoir des souvenirs. Il faut pouvoir les oublier, quand ils sont nombreux, et il faut avoir la grande patience d'attendre qu'ils reviennent. Car les souvenirs ne sont pas encore ce qu'il faut. Il faut d'abord qu'ils se confondent avec notre sang, avec notre regard, avec notre geste, il faut qu'ils perdent leurs noms et qu'ils ne puissent plus être dicernés de nous-mêmes ; il peut alors se produire qu'au cours d'une heure très rare, le premier mot d'un vers surgisse au milieu d'eux et émane d'entre eux."

-Rainer Maria Rilke-